

« C’était merveilleux de voir le Professeur Avi Rivkind [Chef de l’Unité de Traumatologie du Centre Médical Hadassah, ndlr] venir nous ramener à la maison », a déclaré Roey Fatal, un jeune homme de 32 ans originaire de Jérusalem, figurant parmi les sept survivants israéliens de l’avalanche qui s’est produite il y a à peine quelques jours, dans le nord du Népal. Roey est maintenant pris en charge dans le Centre Judy et Sidney Swartz de Hadassah, un complexe dédié à la médecine d’urgence. Il y est entouré de sa famille et d’autres survivants, qui ont été ramenés en Israël via un avion privé, gracieusement affrété par un homme d’affaires israélien.
Le Professeur Rivkind, expert de renommée mondiale en traumatologie, s’est directement rendu au Népal pour évaluer la situation, fournir des soins et ramener les Israéliens à la maison. La plupart des survivants sont de jeunes adultes d’une vingtaine et d’une trentaine d’années, qui passaient leurs vacances à faire des treks dans l’Himalaya. Ils ont été pris au dépourvu par une tempête de neige d’une violence inouïe qui a coûté la vie à plus de 40 personnes. Ceux qui sont revenus de l’enfer, souffrent de divers degrés de gelures qui nécessiteront un traitement délicat et de longue haleine.
Roey Fatal a raconté son histoire au fond de son lit d’hôpital à Hadassah. Il admet qu’il est loin d’avoir entièrement surmonté le traumatisme de la mort que l’on voit en face et que l’on croit imminente. Il commence son histoire en précisant qu’il a voulu prendre des vacances en dehors des périodes chargées en matière fiscale, compte tenu de son travail d’expert-comptable. En octobre au Népal, la météo est généralement douce et ensoleillée. En bonne condition physique, Roey Fatal fait partie des réserves d’infanterie des Forces de défense israéliennes. Ce trek semblait constituer la pause parfaite pour lui, loin des imputations comptables et des calculs de l’impôt.
À cinq heures du matin le mardi 14 octobre, Roey et 30 autres Israéliens se réunissent pour effectuer une randonnée jusqu’à Thorung La pass au Nord-Népal, un axe très apprécié des jeunes israéliens et qui culmine à 17 770 pieds (5416 mètres, ndlr).
Ils n’atteindront jamais cette altitude.
« Quelques centimètres de neige sont tombés, et nous nous sommes demandés si nous devions monter », dit-il. « Les guides locaux ont une grande expérience et ils ont haussé les épaules » en ajoutant « pas de problème » mais « ils avaient tort ».
« Vous ne pouviez pas voir à plus d’un mètre devant vous, nous avons alors trouvé refuge dans le seul bâtiment possible, une cabane fragile qui faisait habituellement office de salon de thé », a déclaré Roey. « Nous nous sommes serrés en essayant de se tenir chaud mutuellement. Le plus grand dilemme de notre vie a été de choisir de rester sur place ou d’essayer de descendre la montagne. Le sentiment dominant était que si nous ne partions pas, cet abri deviendrait notre tombe. Je pleurais. J’espérais que l’on reste ici, en attendant les secours. Mais les cris s’amplifiaient et nous avons décidés d’affronter la tempête, tous ensemble, en s’entraidant ».
« Nous avons commencé à descendre la montagne. Il ne m’a pas fallu longtemps pour me perdre. Vous ne pouviez pas voir grand-chose et les traces de pas étaient recouvertes en quelques minutes. Je suis tombé dans une fosse, enfoui jusqu’à mes genoux dans la neige et je ne pouvais pas sortir. Il n’y avait personne pour m’aider. Progressivement, la neige recouvrait mon visage. J’ai gardé ma main droite libre pour creuser un trou d’air, afin de ne pas suffoquer. Puis je me suis endormi. Je me suis dit que si je devais mourir, je mourrais. Mon espoir était que les autres se trouvaient en sécurité et remarqueraient mon absence. Mais j’ai passé toute la nuit comme ça. »
« A sept heures du matin, j’ai entendu des voix. C’était celles de deux étudiants en médecine israéliens à Hadassah, Yakov et Ron. Ils m’ont libéré et ont retiré mes vêtements mouillés. Ils m’ont placé dans trois sacs de couchage et m’ont dit qu’ils allaient obtenir de l’aide dès que possible. Je sais maintenant qu’il leur a fallu huit heures de marche pour trouver un endroit où il y avait un signal réseau suffisant pour pouvoir utiliser leurs téléphones. Ils m’ont sauvé la vie. »
« Une fois encore, je ne parvenais pas à rester éveillé. Un hélicoptère m’a survolé, mais il a dû croire que j’étais mort. J’ai passé une autre nuit seul dans la neige. Enfin, un hélicoptère est revenu et j’ai pu agiter mon bras. J’ai alors été hélitreuillé jusqu’à un hôpital militaire avant de rejoindre un hôpital américain par la suite. Et puis la chose la plus incroyable est arrivée : les médecins israéliens sont arrivés et m’ont ramené chez moi. J’en suis toujours ému et éternellement reconnaissant. Le personnel de Hadassah a été merveilleux avec moi. Ma main droite, que j’ai dégantée pour creuser dans la neige, est aujourd’hui de couleur noire et boursouflée par d’innombrables gelures, mais les experts médicaux de Hadassah m’assurent que je serai bientôt rétabli. »
Galei Tsahal, la populaire station de radio de l’armée, a interviewé Roey peu après son rapatriement. Elle lui a fait l’immense surprise de le mettre en relation avec Yakov Megreli, l’un de ses sauveteurs. Yakov est toujours au Népal mais rentrera bientôt, pour débuter sa nouvelle année d’études de médecine sur le campus universitaire de Hadassah.
« Je me réjouis de te revoir bientôt » lui a alors lancé Roey.
Avant de préciser à Yakov : « Mais cette fois ici, à Hadassah« .